Compte-rendu de lecture: Blijf van mijn lijfje

Lecture faite par Jessica Tatout, GAMS Belgique
Genre Témoignages – récits 
Public visé Tout public
Notions clés

Pratique des MGF au Kenya et en Belgique. Tabou devant être rompu.
Difficulté, voir impossibilité, d’échapper à la pratique.

imgresRéférence

Struyf Annemie en Johanna Laurent, 2014, Blijf van mijn lijfje – Verhalen over genitale verminking van meisjes, Lannoo, België. 

Situer l’auteure

Annemie Struyf est journaliste et auteure. Elle a créée différentes émissions télévisées et écrit plusieurs livres. Pour Blijf van mijn lijfje, l’auteure a collaboré avec sa fille Johanna Laurent, qui est une journaliste récemment diplômée.  

Déterminer le sujet

Les mutilations génitales féminines au Kenya : Au Kenya, Annemie Struyf découvre qu’on excise des filles en masse, bien que l’excision est interdite par la loi. Les cérémonies sont exécutées dans le plus grand secret, et Annemie veut assister à une de ces cérémonies pour la filmer et montrer au monde la réalité de la pratique au Kenya.

Les mutilations génitales féminines en Belgique : Johanna, la fille d’Annemie, est choquée quand elle apprend qu’en Belgique aussi, des filles et des femmes ont été excisées ou courent le risque de l’être. Elle part à la recherche de témoignages de femmes en Belgique. Ces témoignages sont transcrits dans le livre. La plupart de ces femmes ont fuit leur pays afin de se protéger elles-mêmes, ou leur fille, contre les mutilations génitales féminines.  

Résumé

En décembre 2012, Annemie Struyf part au Kenya pour filmer des cérémonies d’excision pour son émission Via Annemie sur la VRT. Plusieurs personnes de confiance ont préparé le terrain pour elle en nouant des contacts, et l’accompagnent pendant son voyage.

Annemie décrit ses expériences au Kenya : elle rend visite à une école qui prend en charge des filles qui ont fui leur famille afin d’échapper à l’excision. Elle assiste à l’excision de deux petites filles et essaye d’assister à une cérémonie où plusieurs centaines de filles se font exciser. Sa présence n’est pas acceptée, mais après beaucoup d’efforts,  2 de ses personnes de confiance peuvent s’approcher et filment la cérémonie avec une caméra dissimulée dans un sac à main. Le livre contient également des témoignages de différentes personnes rencontrées par Annemie  au Kenya : des jeunes filles, des hommes et femmes adversaires et partisans-anes des mutilations génitales féminines.

Le livre présente, en alternance, des chapitres où Johanna décrit ce qu’elle découvre en Belgique. Elle est choquée quand elle découvre que l’excision touche également des filles et des femmes dans son pays. Elle rend visite à différents centres d’accueil pour demandeurs d’asile, où elle rencontre des femmes qui sont concernées par les mutilations génitales féminines. Elle raconte leur histoire dans le livre. Elle recherche également plus d’information sur le sujet auprès du GAMS Belgique.

Le livre est illustré de photos et montre des SMS échangés entre mère et fille pendant la phase d’enquête. 

Critique

Les plus

Les auteures ont déclaré dans plusieurs interviews (à la télé comme dans la presse écrite) que le but de ce livre est d’attirer l’attention sur la problématique des mutilations génitales féminines. Ce but a été atteint : à travers les émissions télévisées et le livre, le sujet a certainement reçu plus d’attention dans des milieux où, d’habitude, cela ne se discute peu ou pas. Cela apporte une pierre en plus dans de la lutte contre les mutilations génitales féminines en Belgique.

Comme les auteures décrivent littéralement et de façon narrative ce qu’elles vivent, le livre est très accessible et aborde la problématique d’une façon simple. Elles expliquent à quel point la pratique est ancrée dans la culture, et comme il est difficile d’y échapper. Les histoires des femmes, qui ont fui leur pays pour se protéger elles-mêmes, ou leurs filles, ainsi que les difficultés auxquelles Annemie est confrontée au Kenya, le démontrent. De plus, le livre montre que l’excision n’est pas un phénomène marginal, mais qu’il s’agit d’une réalité à laquelle beaucoup de personnes sont confrontées. Ces informations gagneraient à être davantage divulguées.

Les moins

Cependant, je trouve que ce livre reflète les faits d’une façon « sensationnelle et victimisante », ce qui est un élément négatif. Il s’agit certes d’un sujet difficile à traiter et d’une pratique traumatisante pour la personne qui l’a subie. Il est donc difficile, voir impossible, de parler des mutilations sans heurter les lecteurs et les lectrices. Toutefois, je trouve qu’il n’est pas nécessaire, pour informer les gens, de souligner et de répéter de si nombreuses fois  l’horreur lié à la pratique.

En tant que lectrice, je ne peux pas me débarrasser du sentiment que  les femmes concernées sont mises dans un rôle de  victime, et qu’on fait de l’excision l’identité de ces femmes. Cela est dommage car la réalité, telle que nous la vivons avec les femmes au GAMS et telle que je la vie pendant mon travail en tant que bénévole en Guinée, ne correspond pas à ce qui est décrit dans le livre : les femmes font preuves de volonté et de grandes capacités pour se reconstruire. 

Avis personnel

Ce livre est une bonne initiative et découle certainement d’une bonne intention. Il pourrait jouer un rôle important en Flandre, en attirant d’avantage l’attention sur ce sujet qui, jusqu’à aujourd’hui, est peu connu.

Toutefois, je trouve que le livre ne s’appuie pas assez sur des études sur l’évolution de la pratique de l’excision et n’explore pas toutes les facettes de la problématique. Ce qui est dommage car, bien que ce livre aurait pu être une œuvre innovatrice et enrichissante, je pense qu’il a manqué quelques opportunités.

Le livre est utile parce qu’il aborde la problématique des mutilations génitales féminines mais je conseille vivement aux lecteurs et lectrices de ne pas se contenter de cette lecture et de se renseigner auprès d’autres sources, afin de pouvoir comprendre les choses dans leurs entières perspectives. 

 Dans ce sens, les livres de Waris Dirie – Fleurs du Désert et L’Aube du désert – sont à recommander : ces livres sont narratifs et accessibles au « tout public », tout en partageant des informations objectives bien étayées. 

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